ETHIQUE DU NORD
Hommage au plat pays
Dans ce paysage sans hauteur, où le regard en montant ne rencontre que les nuages et rien qui les soutienne, n'était le cri d'un clocher entre les peupliers, qui est contraint de chercher en lui-même l'altitude?
Quand se taisent aux fenêtres les fredonnements du soleil--pour d'autre cieux son plain-chant-- et que roussissent les frondaisons, il se fait temps d'allumer les lampes, d'exciter les feux, de rentrer au profond de soi-même en quête d'une vie plus rigoureuse.
L'hiver sera trop doux pour aiguiser nos sens: dans les pluies, les grésils, les neiges fugaces, s'exténuera notre soif d'austérité. Il nous faudra tenir dans la grisaille sans gloire des bourbiers et tenir encore; en attente d'un improbable printemps.
Qui surgira soudain sous les flaques minuscules des violettes, au milieu de la danse des jacinthes sauvages, sous les cascades des vergers en fleurs, dans les parfums oppressants des narcisses et des lilas.
Pays tempéré, plat pays sans certitudes, sans passions sinon obscures et toujours retenues. Pays de tendresses longues et d'élans discrets.
Régions d'ombres fluides, agitées par les vents jouant dans les ormes, les hêtres pourpres, les vastes marronniers; régions d'eaux lentes, de collines basses.
Territoires intérieurs livrés aux fervents : les attentifs du petit matin, les patients de midi, les attardés du jour.
Terres de fidèles.
C. Nys-Mazure
une vue de la "cité ardente" (Liège)